Football Féminin (ITW) : Entretien avec Audric Terreau, coach de l’équipe Régional 1 F de l’AS Mellecey Mercurey
Alors que la reprise de la compétition au niveau amateur n’est pas encore à l’ordre du jour, plongez avec nous dans l’univers merveilleux du football féminin. Une pratique qui continue de se développer à grande vitesse dans notre pays. Qui de mieux pour en parler qu’un coach diplômé et en exercice dans un club de Régional 1 F me direz-vous et vous auriez raison. Découvrez la grosse interview de Mister Audric Terreau, coach de l’AS Mellecey Mercurey. Un échange décapant, franc et passionné. Entretien.
Le bonhomme a de la prestance, du charisme et dégage beaucoup de bonhomie. Vous l’avez compris, on parle bien là de Audric Terreau, 31 ans né à Saint Vallier et coach de l’équipe première senior féminine de l’AS Mellecey Mercurey. Après avoir commencé le foot en poussin à Saint-Vallier, club que le garçon ne quittera pas durant sa jeunesse, Audric Terreau alors joueur senior file à Blanzy où il évoluera trois saisons durant (jusqu’en PL).
Les U15/U18 pour commencer
S’en suivent cinq saisons du côté du CS Sanvignes où le joueur atteindra le niveau PH (R2 actuel) et fera ses premières expériences en tant que coach. Le début d’une nouvelle aventure. Que ce soit avec les U15 ou les U18, Audric s’éclate. Celui qui officie professionnellement en tant qu’éducateur sportif et spécialisé dans un lieu de vie pour jeunes ira par la suite jouer un an au BDV. Puis 6 mois dans son club de toujours, Saint Vallier. La boucle est bouclée. Après quoi, le néo-coach signe à Mellecey Mercurey en janvier 2017. Avant de prendre les reines de l’équipe féminine six mois plus tard..
L’équipe A de l’AS Mellecey Mercurey évolue en Régional 1 F, soit le plus haut niveau régional.
Montceau Sport : Bonjour Audric, peux tu nous dire pourquoi et dans quelles conditions as-tu rejoint le club de l’AS Mellecey Mercurey ?
Audric Terreau : « Bonjour Bull, j’ai rejoins le club pour avoir ma première expérience de coach senior. En l’occurrence avec des féminines. C’est aussi un club où jouaient déjà quelques amies à moi et qui m’ont demandé si je voulais les accompagner. »
Parles-nous un peu plus de ce club, qu’est ce qui t’a de suite plu à l’ASMM ?
« C’est un club familial, qui a pour autant au moins une équipe garçon dans chaque catégorie, qui est structuré et avec de bonnes infrastructures. Les féminines ont été créées en 2015 et ne cessent de se développer, avec aujourd’hui 2 équipes sénior à 11 et une équipe U15 à 8. C’est donc un club développé mais qui vit simplement, ce qui m’a beaucoup plu. »
En tant que coach, quelles différences as-tu trouvé entre les filles et les garçons ?
« On peut presque parler de deux sports différents, tant les différences physiques sont importantes. Le rythme est bien moins élevé. Ce qui explique qu’il y ait moins d’impact physique et donc moins de fautes. Du coup, on est basé sur une pratique un peu plus tactique. Alors que chez les garçons, on peut facilement compenser le déficit tactique et technique par un apport physique et psychologique. L’exemple le plus parlant est la coupe de France. En effet, il n’y aura jamais de surprise dans le foot féminin, alors que chez les garçons on a déjà vu bon nombre de petits poucets s’illustrer. »
La pratique se développe de plus en plus chez les féminines, que penses-tu du niveau actuel général ?
« Le niveau est hétérogène, et dans l’ensemble plutôt faible. Faute principalement à un encadrement trop peu compétent. Ce qui s’améliore néanmoins d’année en année. Et cela y compris dans les grands clubs locaux. Comment expliquer qu’en R1F, des équipes comme DFCO 2 ou AJA, qui s’entrainent de 4 à 6 fois par semaine, ne dominent pas ce championnat..? On est arrivé à un point où l’écusson et le survêtement sont plus important que le football. Et sans parler d’argent, qui prend de plus en plus de place dans le foot féminin. Ceci étant dit, des clubs comme Châtenoy ou Blanzy existent et survivent depuis longtemps. Et ce grâce à leur structure, ce qui leur permet d’avoir encore une marge de progression globale.
Le seul club, d’après moi, à avoir un projet tactique est Saint-Vit. Tout le reste se repose sur les qualités intrinsèques des joueuses, et du « kick and ruch » des anglais d’il y a 20 ans. Pour les plus jeunes, cela consiste à défendre bas, envoyer de longs ballons et jouer les seconds ballons. Ce qui est très dommageable au vu de la qualité des filles de la plupart des clubs. Mes joueuses ne gagnent pas tous les matchs et ne sont pas les meilleures, loin de là, mais je suis fier de leur avoir appris ma façon de voir le foot. Et qu’elles sortent toujours d’un match en ayant pris du plaisir à se faire des passes, à jouer au foot moderne tout simplement. »
« On est arrivé à un point où l’écusson et le survêtement sont plus important que le football.. »
Certains (souvent de manière anonyme) dénigrent la pratique du foot par les filles, moquant leur niveau de jeu, qu’aimerais-tu répondre à ces médisants ?
« Je les comprends, pour toutes les raisons que j’ai cité précédemment Toutefois, j’incite les amoureux du football à prendre une équipe. Les filles sont tellement attentives aux consignes, sérieuses, disponibles, volontaires.. Et elles aiment aussi faire la fête, ce qui n’enlève rien! Pour un tacticien, avoir une équipe féminine peut être un régal, vraiment. La critique est facile, mais peut être positive et constructive. Je me répète, mais j’invite tous les amoureux du beau foot à se pencher sur le foot féminin, ils pourraient être agréablement surpris.. »
Quels sont tes objectifs à moyen et long terme avec le club ?
« L’objectif est de se maintenir en R1 F, faire monter l’équipe 2 en R2 F. Mais pour cela il faut s’améliorer qualitativement, ce qui passe par un recrutement de 5 ou 6 filles. »
La saison est suspendue depuis novembre, comment gères-tu cette situation avec ton groupe ?
« Je suis en contact constant par sms. Je l’ai dit plus haut, les filles sont très concernées et vivent ce manque de sport aussi mal que les garçons. Actuellement, elles suivent un programme que je leur ai fait, et nous toucherons le ballon dès ce dimanche matin (NDLR Entretien réalisé avant le 3 janvier). Et tous les dimanches de Janvier, en attendant les prochaines directives.. »
Quels sont tes objectifs en tant que coach et comment envisages-tu la suite de ta carrière d’entraîneur ?
« Mon objectif principal est de continuer de m’améliorer. Que ce soit au niveau football où j’ai validé mon BMF l’année dernière, mais aussi sur la gestion du foot, où il faut trouver l’équilibre foot amateur et rigueur. Je pense rester dans le monde féminin encore quelques années, si des projets intéressants continuent de se proposer à moi. »
« On va retoucher le ballon les dimanches en attendant les nouvelles directives.. »
Comment s’effectue le recrutement à l’AS Mellecey Mercurey ? Est-ce difficile de trouver de nouvelles recrues ?
« Le recrutement est difficile, comme je l’ai dit, les joueuses préfèrent souvent être remplaçantes dans un club qui a des minibus et un logo connu, que prendre du plaisir sur le terrain (NDLR – Tacle les deux pieds décollés détecté !). De plus, les clubs structurés qui nous entourent sont en lien avec les établissements scolaires, ce qui rend notre tâche encore plus dur à Mellecey Mercurey.
Pour autant j’ai réussi à avoir un groupe de filles du coin, très agréable, avec des joueuses du département, demandées entre autres par le DFCO, mais qui ont bien compris ce qu’était le foot à notre échelle. Elles ont les pieds sur terre. C’est ce genre de filles que je recherche, la technique ne suffit pas, il faut avoir un peu de mental. J’en profite pour passer le message, si vous êtes sérieuses et que vous souhaitez jouer à un niveau intéressant, dans un groupe qui vit bien et qui joue au football, vous êtes les bienvenues! »
Que peut-on te souhaiter de bon pour 2021 ?
« La santé avant tout, ce que je souhaite à tout le monde d’ailleurs, prenez soin de vous et de vos proches. Merci Bull, je t’ai sollicité parce que je trouve qu’il y a une énorme marge de progression dans le foot féminin, et je te remercie d’avoir pris du temps pour connaitre mon expérience à ce niveau là. A bientôt sur les terrains, on l’espère tous! »
Audric Terreau, coach de l’équipe première féminine de l’AS Mellecey Mercurey.
Voir aussi – Couvre-feu avancé à 18h en S&L, coup dur pour les clubs
Mustapha Sofi. © Montceau Sport